A chacun ses gants. En Mauritanie, j'observe avec curiosité les mains des femmes, ou plutôt leurs gants. Épais, en laine et de couleurs vives, je les interroge : pourquoi se couvrent-elles les mains alors qu'il fait plus de 30 degrés?
Simplement pour se protéger des rayons du soleil. Alors que j'espère prendre des couleurs, avoir la peau la plus claire possible est pour elles un gage de beauté.
Elles enlèvent leurs gants pour me tracer les miens, à l'aide de scotch d'abord, puis en appliquant le henné. Quelques heures plus tard, mes mains se retrouvent tatouées pour quelques semaines, teintes d'un dégradé de rouge et noir, comme les leurs un jour de fête.
La parole nous manque mais nous partageons autrement : un verre de thé qu'elles me tendent, un regard complice échangé, un sourire, une poignée de main... Tant de poignées de mains! Gantées de laine ou de henné, colorées, timides ou affirmées, celles qui ne vous lâchent plus... Un geste quotidien et banal, pourtant porteur de sens.
A toutes ces poignées de mains, à toutes ces rencontres...
MAURITANIE 2019
Couleur sable, je me fonds sur la rocaille du Sahel.
Je gonfle mes plumes et parcours le monde d’un battement d’ailes.
Il défile. J’impose le rythme. Le vent grise mon esprit.
Je suis minuscule mais les dunes et les acacias me sourient.
Dans les airs, je n’apparais que si je décide de me montrer.
Jamais sédentaire, rare ont réussi à m’attraper.
Tel un nomade, jamais longtemps au même endroit,
Tu t‘approches et je m’éloigne de quelques pas…
Vif et farouche autant que les enfants sont joueurs,
Je m’amuse à les perdre pendant de longues heures.
Je vole tel un papillon et pique comme une abeille.
Frivole et espiègle, baigné par les rayons du soleil.
Léger mais pas fragile, d’une curiosité insatiable,
Je plonge et explore l’immensité de cette mer de sable.
L’audace pour seule règle. Libre, dans cet infini gigantesque,
Telle la goutte d’eau posée sur le rivage, dans ce climat dantesque.
Bain de foule aujourd’hui, solitude rêveuse demain…
Je navigue mais retourne à l’essentiel avant la fin.
Voler est ma façon d’exister. Du sol au ciel, affranchi et acrobate,
Dans le Sahara et partout dans le monde, on m’appelle Sinkew Chaghat.
Jade MIETTON, 24 mars 2018
SINKEW CHAGHAT
MOHAMED SALEM
Au delà des belles images de dunes et de palmiers qui pleuvent sur le web ces derniers temps pour promouvoir la destination Mauritanie, j ai envie de commencer avec une seule image. Un portrait. Un simple selfie prit avec mon téléphone. Cette photo témoigne du moment le plus fort de mon séjour mauritanien. Une rencontre. La rencontre.
Oui, les dunes sont ocres, les montagnes contrastent et déclinent tout un panel de couleurs chaudes, les palmeraies sont toujours surprenantes tant elles offrent un écrin de verdure renaissant du sable... mais le plus beau paysage, à mes yeux, a été le visage de cet homme: Mohamed Salem. Il nous a été présenté comme notre chamelier. Je le sais nomade. Je le découvre ingénieux bricoleur, chasseur de scorpions hors pair, habile couturier... Il sait tout faire, bien et avec rien.
Mohamed Salem ne parle pas français. J'apprends quelques mots d'hassani, mais nos échanges sont très limités. Qu'importe.
La communication ne se limite pas à la simple parole. Ce n'est pas le premier chamelier que je rencontre, mais je l'observe, attentive et apprends beaucoup. Peu de regards même, son savoir m'impressionne et m'inspire tant de respect...
Il est concentré, sérieux. Le genre de personne qui parle que s'il a quelque chose de pertinent à dire.
La journée, après avoir réajusté son turban noir, il marche, infatigable, son bâton de bois sur les épaules, suivi par quatre dromadaires qui ont vite repris le rythme. Il fredonne, comme pour donner du courage à toute la caravane.
Sans cesse au travail, Mohamed Salem charge, décharge ses montures, use ses mains en tirant sur les cordages, en coupant du bois, inlassablement. Il monte la tente mauritanienne, égorge un cabri, retrouve un bâton de sig perdu dans le sable, fait cuire de délicieux beignets dans une marmite d'huile posée sur le feu de bois, mouline à l'ancienne les légumes de la soupe, sucre son thé avec gourmandise, s'applique à me colorer les doigts avec du henné et chaque soir, nous concocte une délicieuse galette de pain cuite dans le sable... Oui, Mohamed Salem sait tout faire!
Je l'ai même rebaptisé Mac Gyver! (Prononcez Mac Gyvery par l'équipe mauritanienne!).
Nous rions. Quand je ramasse un bâton pour imiter son travail de chamelier, sauf que moi j'embête Mohammed, le cuisinier, nous rions. Quand il me parle comme si je comprenais parfaitement son langage, que je me retourne vers Selkou, le guide, en disant: "Heu... Qu'est ce qu'il a dit là??", nous rions. Quand chaque soir, à la lueur d'une frontale, nous jouons tous au Sig et que je cris "Moudariiiiii" (tricheur) à Selkou, nous rions! Le chamelier et moi contre l'équipe cuistot/guide et nous gagnons presque systématiquement! Quand c'est à mon tour, il me lance en français: "Vas-y!". Alors je touche le sable de la paume de la main, comme il le fait lui même, pour nous porter chance. J'obtiens "arba"! Quatre! Donc nous marquons un point! Il attrape mon bras par la polaire et l'agite dans tous les sens au dessus de ma tête! Mohamed Salem aime gagner. Serait-il un peu mauvais joueur? ;-) De si bons moments partagés... Simples... Précieux.
Nous arrivons dans son campement. Sa femme nous attend dans une grande tente colorée, si bien tendue que les bourrasques de vent ne l'a font pas trembler. Elle prépare le thé. D'un coup, le visage de Mohamed Salem s'illumine, ses yeux captent l'essentiel, son regard se transforme. Vêtu d'un simple t-shirt, le petit garçon de deux ans court se réfugier dans les bras de son père. Ils sont magnifiques. Je suis ravie de constater que la relève est bien assurée. Ce soir là, pour fêter les retrouvailles et parce que les troupeaux sont à proximité, la viande est au menu. Emballés dans du papier alu, les morceaux cuisent dans les braises et nous dégustons le foie en guise d'apéritif (ce que je préfère!). Le repas terminé et les os bien rongés, Mohamed Salem s'attaque à l'élaboration d'une pipe à tabac avec le tibia du cabri. Rien ne se perd.
Il y a eu tellement d'anecdotes, tellement d'astuces observées pendant ces quinze jours partagés. J'ai rapidement vu en lui la droiture, l’intégrité, la sagesse. Il possède en plus une espèce d'aura qui lui donne une dimension supplémentaire. Vous l'aurez compris, j'ai ressenti pour lui un vrai coup de foudre humain. Un nomade comme le monde n'en connait plus beaucoup.
"Choukran jesilen" Mohamed Salem. Merci beaucoup pour ta générosité et pour m'avoir accepté dans ton quotidien, au sein du désert, ta grande maison à ciel ouvert.
Printemps 2018
Maurice FREUND
De Bidon en Ardèche jusqu'à Atar en Mauritanie! En passant par Lyon et Maaden ! Des milliers de kilomètres pour avoir une dédicace, la plus belle des dédicaces...d'un homme qui m'inspire et pour qui j'ai beaucoup de respect. Merci Maurice FREUND... pour le travail de ta vie, ton engagement à désenclaver notre beau désert, ton énergie inépuisable, tes avions...
Je vous conseille chaleureusement ce livre !
"Notre choix repose sur des zones fragiles et déshéritées là où les populations sont en souffrance et vivent sous le seuil de pauvreté. Là où le tourisme peut humblement améliorer le quotidien des plus démunis". Maurice FREUND.
Pour plus d'infos son agence Point-Afrique et sur les vols / circuits proposés, c'est par ici !
Pierre RABHI, Jade MIETTON, Maurice FREUND
chez Pierre en Ardèche, meilleur ami de Maurice.
JERUSALEM
Quand le silence devient assourdissant et l'art politique.
Vous n'aurez que très rarement l'occasion de voir Jérusalem toutes portes closes... comme ce fut le cas le jeudi 7 décembre 2017.
Pour changer un peu du Sahara, je m'embarque début décembre à Jérusalem. J'aurai tellement à partager de ce voyage...
Un des événements les plus marquants à été la réaction des habitants de la vieille ville de Jérusalem suite à l'annonce de Donald Trump le 6 décembre, de déplacer l'ambassade des Etats-Unis de Tel-Aviv à Jérusalem.
Aucune manifestation mais des portes closes qui en disent long...
6 décembre 2017, fourmilière habituelle...
7 décembre 2017
LE NIGER
Janvier 2017. Retour du Niger. Je tiens à relater mon expérience à Agadez, où j ai passé 3 semaines en décembre. Je ne vais pas vous sortir ici l’habituelle rengaine misérabiliste et sécuritaire de l’Afrique. Non, je ne vous parlerai pas de migrants, de présence djihadiste, d’insécurité, de zone rouge... les seuls couleurs que je pourrai évoquer ici sont celles des tenues des femmes, arc en ciel éclatant sur peau noire.
J'ai profité de ce voyage pour assister à la fête nationale de l'Indépendance qui s'est tenue cette année à Agdez, le 16 décembre 2016. Étant relativement peu intéressée par les défilés militaires, les cérémonies officielles de décoration des ronds points... je suis partie à Agadez pour rencontrer les agadeziens. Après un train, un bus et deux avions, j arrive à Niamey, le 1er décembre. Le voyage n’est pas terminé, 1000 km en voiture à travers le pays pour rejoindre la capitale de l’Aïr. On m avait prévenu de l’état de la route... on ne peut s’en rendre compte sans l’avoir emprunté.
Une honte pour un axe principal...
Agadez
Dès la sortie du 4X4, l’air plus frais qu’à Niamey me caresse le visage. Après 18h sur cette "route" éprouvante, mon corps semble sortir tout droit d’une machine à laver après essorage. Je suis fatiguée. Mais bizarrement, j’ai aimé cette traversée.
Elle est à l’image du pays, difficile mais belle, variée, changeante, colorée... et je garde le souvenir d’un excellent mouton mangé à Abalak lors de la pause repas!
Ça y est, je suis à Agadez ! Dans cette zone, pardon, cette région qui alimente mes rêves depuis des années! Pas de comité d’accueil en grande pompe, pas d’officiels ni de tapis rouge mais une famille m attend. Rabi, la maman, accompagnée de sa ribambelle d’enfants plus beaux les uns que les autres. Leurs yeux brillent de générosité, de simplicité et de bons sentiments.
Ils ne parlent pas français, il n y a pas de douche, pas d’eau chaude, pas de "conjoncture", tous dépendent des coupures d’électricité.... qu’importe ! Je voyage aussi et surtout pour ne pas retrouver ce que j ai à porté de main à la maison. Sans même me connaitre, ils m intègrent immédiatement. Sauf peut-être la petite dernière : Naïma, qui a très peur de moi... me trouve-t-elle trop pale, malade ? Ça n’a pas duré. On est vite devenu copines et j’ai bronzé un peu!
Au rythme de leur quotidien, nous partageons chambre, repas, corvées, jeux... nous vivons ensemble et créons très rapidement des liens aussi serrés que les tresses touareg que Rabi me fait sur la tête.
Dans cette ville aux murs ocre, au centre d’une carte, point de départ des plus belles excursions sahariennes, je me sens bien...
Dans le dédale de ses rues poussiéreuses, j’aperçois la mosquée, mythique, je retrouve des amis touareg croisés en France, surréaliste ! Moment de joies intenses, larmes d’émotions dissimulées par nos accolades.
Les journées sont ponctuées de belles rencontres, de retrouvailles, de grandes discussions autour du thé ou d’un Oriba. On parle économie, politique, éducation, environnement, tourisme, élevage, agriculture. ... On se pose des questions mutuellement. Très simplement, très franchement ! Tous très ouverts, très curieux. Comme un soir à Azzel, à 15 km d Agadez, où j ai eu une grande conversation sur les relations hommes-femmes avec Tchimba, 67 ans et ses amis du village. Sans jamais tomber dans le jugement, nous prenons le temps d’apprendre les uns des autres.
En ville, certains me prennent à parti, ils ont des messages à faire passer, à leur gouvernement, à l’Occident, au monde. A l instar de Hamza, forgeron, qui souhaite s’exprimer. Le commerçant résume : plus de touristes, plus de clients, plus d’argent... Il s étonne de l’image de son pays en France quand il constate le nombre d attentats perpétrés sur notre sol et chez nos proches voisins... Il me demande de leur faire une bonne publicité "pour que les amis reviennent"! Je le laisse témoigner face caméra.
Il a toute l’énergie de l espoir.
Sorties de route
N’ayant pas attendu dans une salle climatisée qu’on me lise mes droits, je décide de quitter la ville pour partir en brousse, à 120 km d Agadez. Curieuse d’autres points de vue, d autres histoires. Même accueil chaleureux dans ce petit campement Peuls. De nouveaux regards scintillants comme autant d étoiles dans le ciel ce soir là. Nuit dehors, fraîcheur ambiante tempérée par la chaleur des attentions de mes nouveaux amis et du feu crépitant. Alors qu’ « ils n’ont pas assez de tout », ils me partagent l’essentiel, un bout de leur vie: dattes, fromage, riz et problèmes quotidiens.
Devant la caméra, les revendications pleuvent de la part de Doula, chef de groupement: manque d’accès à l’éducation, aux soins, sentiment d’être laissé pour compte...
Le plus choquant pour moi : l’accès à l’eau potable, pourtant indispensable aux hommes.
Indispensable aussi pour les troupeaux, ressource principale, bien le plus précieux qui conditionne la vie des Peuls en brousse.
Je vais chercher l’eau du puits moi-même. Liquide gris, parsemé de mouches et d’excréments de chauve souris. Infâme. Vital.
Oui, le Niger à beaucoup à faire pour son peuple.
Oui, le peuple est composé de Nigériens motivés, optimistes, pleins de projets et d’initiatives.
Comme mon ami Agal Waissan avec son « Grand Marathon du Ténéré » à qui j’ai fait la surprise de ma visite.
Même si la mise en place est difficile, il ne lâche rien, il ne se pose pas en victime blasée par le manque d’engagement concret de son gouvernement. Malgré le travail et l’énergie que ça lui coûte, malgré le fait qu’il n’en récolte rien, il continu de transpirer pour cette noble cause : courir pour la paix au Sahel.
Apres avoir travaillé à ses côtés en France, je suis très fière de courir le GMT, aux côtés de Nigériens, de Togolais, de Béninois....... et bien d’autres.
Je retrouve un autre ami, Mawli Dayak, connu à Paris, de retour chez lui à Agadez. Déjà bien occupé par sa société Temet-Événements, engagée dans l’organisation de manifestations culturelles, touristiques, et la promotion du Niger ; il vient de lancer une ONG, la fondation Mano Dayak. Autre ambition qui promet de beaux projets pour l’avenir de cette région. Mawli et Agdal font partis de ceux qui ne voient pas uniquement leur intérêt personnel et immédiat. Ils pensent au long terme, ils pensent pour toute une communauté.
Ces deux hommes d’exception, après leur séjour en France, auraient pu mettre un terme à leur investissement au Niger. Mais ce passage, cette expérience enrichissante leur a permis de se concentrer sur l’essentiel : des projets à accomplir chez eux. Je suis admirative de leur volonté, leur personnalité et leur faculté d’adaptation...
Toutes ces initiatives sont à suivre et à encourager. Elles reflètent les envies, l’énergie d’une jeunesse qui n’attend pas grand chose du gouvernement et des interventions étrangères mais qui prend elle-même ses décisions et son avenir en main.
La fête ! Et après…. ?
Le vol Paris-Agadez se pose sur l’aéroport international Mano Dayak. En ville, je retrouve bon nombre d’amis français, fidèles du Niger, venus profiter de cette trop courte semaine. Chaque jour comporte son lot d’événements, cérémonies officielles, défilés militaires, GMT, intronisation du sultan, fantasia, FIMA, concerts… Le président lui-même fait le déplacement pour la fête de l’Indépendance.
-Un vent du tonnerre ce jour-là… comme s’il voulait nous dire quelque chose...-
Les militaires sont nombreux, quoi de plus normal dans un tel contexte ! Quand notre président se déplace à Lyon, le dispositif est comparable.
Pendant que certains font la fête, je passe du temps chez mes amis forgerons au pied de la mosquée. Hamza sourit, je le devine très clairement sous son taguelmoust ! Une aubaine l’arrivée de cette centaine de touristes. Il me demande combien de personnes arriveront lors du prochain charter. Je lui explique que ce n’est pas prévu, que c’est un vol exceptionnel, juste pour les festivités. Surpris, ses pommettes retombent : « Il n’y aura qu’un seul avion ? ».
Je lis la déception dans son regard : « Pour l’instant Hamza, pour l’instant… Il y en aura d’autres ! Inch’Allah ! Et on va tout faire pour ! On peut encore espérer, on peut encore agir ! ».
Nous partageons un thé dans sa boutique.
Des mètres cubes de béton, des kilomètres de macadam, un feu d’artifice et quelques dizaines de millions de Francs CFA plus tard, quels bénéfices durables et quotidiens pour les Agadeziens ? Dans quoi vont être investi les 107 millions d’euros d’aide attribuée par Bruxelles au président Mahamadou Issoufou ? J’aurai bien quelques idées…
« Théâtre de rébellions », « zone interdite et oubliée », Agadez est pour moi un merveilleux carrefour de rencontres et d’échanges. Il est temps de partir, rejoindre Niamey et reprendre l’avion, les miens m’attendent pour Noël. Les au revoir sont sobres et rapides. Une poignée de main, une accolade, un regard qui ne s’attarde pas. J’ai du mal à retenir mes émotions, je sers les enfants dans mes bras, je les embrasse ! Eux sont graves, ne me montrent rien et filent dans la maison. On me presse, le 4x4 m’attend… 1000 km dans l’autre sens. Dans le rétroviseur, le portail rouge s’éloigne, dernière traversée de la ville. Je sais qu’ils pleurent et j’ai moi-même beaucoup de larmes dans les yeux.
Le Quai d Orsay conseille d’ordinaire aux occidentaux de limiter à 48h leur présence à Agadez. J en ai cumulé 480.
Je garde en mémoire ces visages souriants d’hommes et de femmes, les regards et les rires des enfants.
Ils accumulent beaucoup de contraintes, que ce soit dans la capitale, en ville ou en brousse. Mais chacun tente de s’en sortir, à joindre les deux bouts. Malgré cette vie difficile, ils gardent les valeurs simples et essentielles d’accueil, de sympathie, de générosité. Et certains ne font pas que rêver d’un avenir meilleur, ils sont en train de le construire.
Est-ce qu’Agadez est à nouveau fréquentable ? Pour ma part, j’ai hâte de la retrouver."
Jade MIETTON, 7 janvier 2017
ENTRE 2 DESERTS
Tout juste rentrée de Djanet, des images pleins la tête et du sable encore au fond du duvet, je prépare mon départ imminent pour Agadez. Non, vos yeux ne vous trahissent pas, j’ai bien mentionné Djanet et Agadez. Destinations improbables pour beaucoup, une évidence pour la passionnée que je suis.
J’ai eu la chance (et je me suis donnée les moyens) d’assister à la dernière Sebiba en octobre et de me balader dans ce coin de l’Algérie que je connais si bien et que j’aime tant. Avec mes amis touareg, dans une quiétude propre au désert, nous sommes allés à Tisras, Tamrit, Tikobawine, Imloko, Tifaterssine, Tiraret, Jabbaren... Ils m’assurent que nous pouvons également nous rendre en Tadrart, sur l’erg Admer, sur les sites d’Essendilen, d’Iherir, Dider… Et au moment où j’écris, je lis sur Internet que l’Assekrem, Mertoutek et Tafedest se ré-ouvrent. Apparemment ce n’est plus qu’une question de semaines pour le Tassili du Hoggar… Le vent serait-il en train de tourner ?
A Djanet, l’impatience de la population à voir à nouveau débarquer les vacanciers et passionnés français est palpable. Ils y croient, ils le sentent, « les formalités pour l’obtention des visas vont s’améliorer ». Leur optimisme les maintient, leur patience doit être récompensée… En attendant, ils s’occupent de ceux qui, comme moi, continue à y aller : allemands, italien, suisse, polonais !
Nostalgiques, les Touareg que je croise me supplient de leur faire « une bonne publicité » en France. La nostalgie… que je rencontre si souvent ici quand j’organise des « soirées sahariennes ». Car plus qu’une passion, le désert à orienté ma vie. Aujourd’hui, je réalise des documentaires. Le premier : Loin du désert (52 min, 2015) s’intéresse à la diaspora touareg de France. Le deuxième est en phase de prendre vie au Niger en co-réalisation avec Thomas Fish. Avec Thierry Tillet, un autre projet nous emmènera dans d’autres contrés désertiques… Et je compte bien retourner à Djanet avec une caméra ! Il y a beaucoup de choses à faire, à dire, à dénoncer ou au contraire, à encourager.
Et comme le disait Mano Dayak : « Je sais que jamais je ne pourrais vivre très longtemps loin du désert. »
Novembre 2016